Le gouvernement a récemment présenté son plan de relance de l’économie. Pour les auteurs de cette tribune aux « Echos », il existe un levier essentiel à activer pour doper la reprise : la construction de logements. Il en manque 900.000 en France.

Par Bernard Cadeau (ancien président du réseau Orpi France), Matthias Baccino (vice-président de la Fondation Concorde), Eric Roux (membre du conseil scientifique de la Fondation Concorde)Publié le 6 oct. 2020 à 18:00Mis à jour le 9 oct. 2020 à 11:08

Dans la France post-confinement, un constat toujours plus d’actualité : notre pays manque de logements de qualité pour tous. Dans la nouvelle organisation gouvernementale, le Logement est rattaché à la Transition écologique, donc figure au second rang protocolaire. C’est un geste très fort, en même temps qu’un message très clair à l’adresse des professionnels : le logement doit être demain écoresponsable.

C’est un objectif structurant de la politique de court, moyen et long terme. Pour y parvenir, la démarche ne doit pas être punitive, mais pédagogique, accompagnante et aidée. Des arbitrages devront se gagner à Bercy. Les Français sont parfaitement conscients des enjeux et volontaires, à condition de les y aider.

Irriguer l’économie nationale

La France manque de près de 900.000 logements et notamment des logements résidentiels locatifs à prix raisonnables. La construction est en berne, les besoins ne cessent d’augmenter. L’Insee les évalue en hausse de plus de 30 % en 2030, c’est-à-dire demain.

Construire des logements cumule de nombreux avantages : c’est tout d’abord un gisement d’emplois très important, de l’ordre de deux emplois créés par logement construit. C’est une bonne manière d’irriguer l’économie nationale et locale. C’est aider la transition énergétique et le développement durable grâce à une construction éco responsable. C’est favoriser la mobilité professionnelle.

Opinion | Pourquoi la France doit construire en hauteur

La relance globale de notre économie doit s’appuyer sur le logement. C’est un actif tangible, non délocalisable et résilient : c’est la valeur refuge par excellence. C’est également une alternative sérieuse pour les investisseurs face aux incertitudes de la Bourse et des marchés volatils. La relance ne devra laisser ni les primo accédants, ni les classes moyennes sur le bord du chemin : ils rencontrent de plus en plus de difficultés à accéder au crédit immobilier et le marché locatif est très sélectif.

Pour un programme national

La France doit très rapidement lancer un programme national logement, volontariste afin d’éviter que les fractures territoriales et sociales ne s’accroissent dans notre pays. Il faut repenser la chaîne de valeur de la production, depuis les règles d’urbanisme jusqu’à la vie dans les immeubles. Il faut également repenser les territoires et leur aménagement, les moyens de transport, produire du foncier abordable, favoriser les villes moyennes à distance raisonnable des grandes métropoles pour une meilleure qualité de vie.

Plus de 7 millions de logements attendent d’être rénovés en France.

Tout ceci vaut également pour le parc existant et sa rénovation. Plus de 7 millions de logements attendent d’être rénovés en France. L’épargne est abondante dans notre pays, et continue d’augmenter. Il convient donc d’encourager les Français à la flécher vers le logement, au service d’une politique ambitieuse.

Outre les investisseurs institutionnels qu’il faut faire venir massivement, il faut penser aux petits bailleurs privés qui achètent avec un objectif de revenus complémentaires au moment de la retraite. Ils méritent amplement un statut ad hoc, ès qualités d’agents économiques et eut égard à la fonction sociale qui est la leur : loger des familles.

Simplifier, stabiliser, sanctuariser

A cet égard, une refonte globale de la fiscalité du logement est indispensable, elle pourra s’articuler autour de la lettre « S » : Simplifier, stabiliser, sanctuariser. Aussi, nous en appelons au gouvernement, pour qu’il redonne confiance aux acteurs du logement et libère en ce sens les énergies : libérer au plus vite les fonciers disponibles, lancer des assises de l’urbanisme afin de repenser des règles plus en accord avec les besoins du terrain, créer un passeport des bons locataires car la confiance est la clé de voûte d’un marché fluide entre bailleurs et locataires.

Le logement est à la fois un produit de première nécessité et un élément clé du bien vivre. Nous croyons qu’une France bien logée est une France apaisée. Sans perdre de temps, la France doit se mobiliser en faveur de ce levier de croissance que constitue le logement.

Bernard Cadeau, ancien président du réseau Orpi France. Eric Roux, membre du conseil scientifique de la Fondation Concorde. Matthias Baccino, vice-président de la Fondation Concorde.