Notre outil de défense fonctionne. Rien ne sert de le révolutionner. Mettons plutôt en œuvre des mesures réalistes pour l’adapter à la menace terroriste.
 

La menace terroriste à laquelle la France fait face pose de nouveaux défis que la Défense mais aussi la nation toute entière se doivent de relever. L'opinion réduit trop souvent ces défis à des oppositions qui ne devraient pas avoir lieu d'être : entre sécurité intérieure et menaces extérieures ; entre ambitions et moyens budgétaires.

Il est essentiel que les décideurs politiques ne cèdent à la tentation de révolutionner un outil de défense, qui fonctionne, pour répondre au nouveau contexte sécuritaire. Plutôt que de redessiner un nouveau modèle d'armée, il convient d'identifier et de mettre en oeuvre des mesures réalistes qui permettront d'adapter notre défense aux défis auxquels la France fait face. Ces mesures devront répondre à un double enjeu.

Préparations militaires pour les jeunes

Le premier est de repenser la place de la nation dans l'effort de défense, sans rétablir un service militaire qui n'est pas pertinent. En 1997, le service militaire a été suspendu pour les bonnes raisons. Les missions confiées aux armées nécessitaient une force professionnelle, entraînée pour des situations tactiques complexes et utilisant un matériel de haute technologie. Ces raisons sont toujours valables aujourd'hui. Rétablir un service militaire obligatoire pour tous ne répondrait ni aux besoins des armées ni aux attentes de la jeunesse.

Pourtant, le lien entre la jeunesse et les armées est fondamental pour que les citoyens prennent conscience du sens des efforts de défense qui sont demandés à la nation. En 1997, ce rôle était dévolu d'une part à la Journée d'appel de préparation à la défense (devenue Journée défense et citoyenneté) et, d'autre part à un enseignement de défense au sein de l'Éducation nationale. En 2016, ces deux dispositifs sont tellement dilués qu'ils ne remplissent plus leurs missions.

Les modules défense ne sont presque jamais enseignés, leur organisation est chaotique. Il conviendrait d'en faire un parcours obligatoire, cohérent, clairement identifié et évalué en fin de cycle. La JDC concentre, elle, des formations diverses allant de la sécurité routière au don d'organes ; il serait préférable de la supprimer et d'inciter les jeunes à rejoindre les préparations militaires en valorisant et en dotant mieux ces dernières. Ces dispositifs plaçant les jeunes en immersion pendant plusieurs jours, sous statut militaire, existent et ont fait leurs preuves. Ces premières pistes doivent faire partie des mesures réalistes qui permettent de former des citoyens conscients des enjeux de défense et mieux préparés à répondre aux défis de la sécurité nationale.

Solution pérenne

Le deuxième enjeu est d'adapter les armées et leurs missions aux défis sécuritaires, sans mettre en péril leur capacité à mener leurs missions premières. L'opération Sentinelle est un témoignage quotidien de la réponse des forces armées à la menace terroriste. Déclenchée, légitimement, dans l'urgence des attentats, elle est devenue une mission permanente.

L'effet de masse de Sentinelle peut donner un faux sentiment de sécurité à la population.

Alors que les forces françaises sont engagées dans de nombreuses opérations extérieures, qui contribuent également à la sécurité des populations en France, les armées atteignent aujourd'hui les limites de leurs capacités. Sentinelle fait donc peser un risque sur la capacité des armées à remplir leurs missions : stress croissant de personnels militaires sur-engagés, réduction de leur niveau de préparation, absence de marges de manoeuvre en cas de nouvelle situation de crise… Par ailleurs l'effet de masse de Sentinelle peut donner un faux sentiment de sécurité à la population. Il convient donc de remplacer cette opération par une solution réellement pérenne.

Les forces armées ont un rôle à jouer dans la sécurité intérieure en contribuant à créer une force de sécurité intérieure complémentaire à la police et la gendarmerie. Si le prochain Président de la République confirmait la création d'une «garde nationale» il s'agira de structurer un dispositif qui permettra de soulager les armées tout en apportant une réponse à la fois militaire et citoyenne aux enjeux opérationnels sur le territoire national. L'actuelle réserve militaire étant laissée à l'abandon, selon «Les Echos».

Ces citoyens engagés se verront formés par les armées à la protection des populations face à la menace terroriste. Une mission permanente de militaires de carrière, d'un format réduit (1.000 à 1.500 soldats), viendrait encadrer ce dispositif. Là encore, il s'agit de premières pistes qui doivent être développées.

La France dispose aujourd'hui d'un outil de défense performant mais placé en limite de ses capacités à force d'être trop fortement mobilisé. Pour répondre aux défis sécuritaires, des mesures réalistes pour d'adapter notre modèle de défense tout en s'appuyant sur les atouts des armées doivent être mises en place.

 

Publiée dans les Echos

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